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Twilly

Lou Ros 

12 juin 2025 _ 26 juillet 2025

Ancre 1

Sur le visage d’un chat “Elle a d'elle-même, réglé son pas sur le mien, et le lien invisible, d'elle à moi, suggérait le collier et la laisse” — Colette, L’Étoile Vesper Il n’y a rien d’évident à peindre son chat. L’animal a beau dormir des heures, il se réveille toujours au moment où l’on tente quelque chose, il ne peut tenir en place et ne se prête guère à la pose. Twilly se laisse photographier brièvement, au soleil à contre jour, de profil allongé de tout son long. Si la peinture nécessite de trouver la juste distance entre la couleur et les choses, il faut sans cesse recadrer pour capter quelque chose de l’oriental shorthair. Lou Ros adapte sa toile, peint à une échelle plus réduite, plus intime, de manière à représenter la tête presque à taille réelle. Qui domestique l’autre ? Les oreilles se détachent tout de suite et attirent les regards, de trois-quart ou de face. On finit par discerner un visage, c'est-à-dire admettre la possibilité d’une reconnaissance, voir un chat en particulier. Colette à longueur de pages a su décrire la personnalité des chats, voir au-delà de l’animal en général l’être en particulier. Twilly a son caractère, c’est, au travers de différentes facettes, une même personnalité que le portrait s’efforce de saisir, de cerner. Au fusain, Lou Ros, joue de la silhouette élancée du félin, formidable prétexte à tous les raccourcis. Une patte avancée permet de donner un dynamisme à la composition. La contrainte du format, de la feuille souligne la souplesse de l’animal au travers de ses contorsions. On pense quelque part à la Genette ou au Serval de Gilles Aillaud. L’expressivité des mouvements donne l’impression d’un dessin sur le vif mais c’est bien d’après photo que l’artiste travaille, cherchant une composition, une position. En faisant l’abstraction d’un cadre de vie, d’un décor, l’artiste s’attache à un corps qui se meut, à des tâches qui se fondent, des rayures qui se confondent. L’animal apparaît dans une nudité qui nous confond ; ni la maison, ni la cage où l’on aimerait l’enfermer, ni même l’extérieur, une nature fantasmée dont il ferait partie. Sans prétexte. En faisant ressortir son modèle depuis des aplats colorés, Lou Ros donne l’impression de nous la montrer à chaque fois pour la première fois. C’est le propre de l'icône, la leçon de Warhol qui avait le temps d’un portfolio décliné sa pratique de la sérigraphie pour des espèces en danger. La série de Twilly fait suite à des peintures qui nous confrontaient à des oiseaux menacés. Il se joue dans la peinture, par ses dimensions mais pas seulement, quelque chose de notre relation au monde. La représentation engage un rapport de regard très concret. Si la peinture parvient à rendre l’animal présent, il se renoue quelque chose entre lui et nous. Les toiles jouent avec les codes de représentation des félins, le portrait aux tonalités jaune, plutôt hiératique, évoque la statuaire égyptienne, celui qui joue d’une composition synthétique propres aux années 1930 évoque Pierre Jean Jouve ; dans les rouges et vert mêlés d’un autre on retrouve la palette de Steinlein. Chaque tableau est unique mais renouvelle quelque chose d’un pacte, d’une compagnie. Henri Guette

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